La droite et la courbe
La pratique du dessin de formes s’inscrit de façon régulière tout au long des trois premières années d’école. L’élève apprend à dessiner des formes et à créer les siennes propres. Loin de se limiter à la seule acquisition d’une capacité graphique, cela permet à l’enfant d’explorer activement la diversité des formes dynamiques à l’œuvre dans la nature.
Il ne s’agit pas pour autant d’une activité figurative comme le dessin, censée représenter un objet. Pour cette activité, l’enfant travaille sans instrument (règle, compas…) afin qu’il produise à partir de lui-même le geste dynamique se trouvant à la base des formes. Effectuer un cercle en se servant d’un compas relève de l’acquisition d’un savoir-faire spécifique ; son traçage à main levée requiert davantage la mise en route d’une forte activité intérieure : nul ne peut tracer un cercle s’il n’est pas centré en lui-même. Les formes sont souvent « marchées » ou tracées dans l’espace avant d’être exercées sur le papier.
Ces exercices de graphisme sont exigeants, ils soutiennent les élèves tout au long de l’acquisition de l’écriture et de la lecture et bien au-delà en stimulant la coordination sensorielle.
Pour les élèves de 1e classe, il s’agit de tracer des formes simples qui peuvent se ramener aux deux grands archétypes que sont la droite et de la courbe. La plasticité du monde se décline en une infinité de formes dérivées de ces formes fondamentales.
En 2e classe, l’enfant explore les rapports de symétrie. Le monde vivant se déploie souvent dans la symétrie axiale. L’être humain lui-même a besoin d’apprendre à se placer dans un ensemble de dualités spatiales : côté droit/côté gauche, haut/bas, devant/derrière…L’exercice le plus courant consiste à placer devant l’enfant une forme incomplète, « une moitié », en lui demandant de la compléter. Cette activité mobilisant fortement sa concentration, permet à l’enfant d’exercer sa force d’abstraction tout en s’appuyant sur une image concrète et de développer sa motricité et sa latéralité.
En 3e classe, l’enfant devient davantage apte à observer le monde et à le placer devant lui comme un objet. L’élève maîtrise mieux le tracé des formes simples ; la symétrie s’enrichit d’un deuxième axe. Il s’agit donc désormais de composer des formes équilibrées autant en rapport avec l’axe horizontal que l’axe vertical. Ainsi, la notion de centre est vécue par le dessin, à un âge où l'enfant se ressent davantage, de manière plus ou moins consciente, comme un individu distinct du monde qui l'entoure. L’enfant de cet âge, très réceptif au monde vivant, s’ouvre à des représentations spatiales plus complexes et peut également s’exercer sur des variations de formes non symétriques que l’on trouve de façon archétypale dans le trèfle, les rosacées…
La pratique du dessin de formes est une spécificité de la pédagogie Steiner-Waldorf dans la mesure où elle ne vise ni l’exécution technique d’un graphisme ni la réalisation artistique d’un dessin. Il s’agit d’essayer de faire ressentir à l’enfant, par le mouvement, la mobilité, la plasticité et l’élan dynamique des diverses formes.